Découvrez l'histoire fascinante des lampes JUMO : Éclairage, Design et Innovation
Je vous présente l’histoire des lampes de la Société Nouvelle des Établissements JUMO. Le nom de cette entreprise est issu de la contraction des noms de famille de ses trois créateurs, Yves Jujeau, Pierre et André Mounique. JUMO est spécialisée dans le matériel électrique et la plasturgie, située au 2 rue Sadi Carnot à Bagnolet. Cette ville, l’un des berceaux industriels de Paris, a vu l’installation de nombreux ateliers de création de luminaires et de mobilier, tout comme Montreuil. JUMO n’était pas un cas isolé. De nos jours, certains ateliers perdurent dans ces villes.
Ces trois créateurs avaient une idée simple mais avant-gardiste : créer des lampes de bureau fonctionnelles, de qualité, élégantes, et abordables pour répondre à l’expansion de la tertiairisation de l’économie française. La première lampe produite fut la « Lucidius Bloc », reconnaissable par son style paquebot ou streamline. Elle était surtout remarquable pour son mécanisme sans interrupteur (breveté) et sa matière, la bakélite ! Elle portait la marque de JUMO et le label « Made In France ». Souvent sans paternité reconnue, mais son brevet d’export pour les États-Unis indique qu’André Mounique en était l’auteur.
Extrait du brevet N°911.667 du 25 mars 1946 – source INPI
De nombreux modèles sont apparus rapidement avant les années 50 et ont attiré l’attention. On dit que le modèle 600 a été sélectionné pour l’exposition « Le Bazar » en 1949 au musée des Arts Décoratifs, mais je ne peux pas le confirmer. La gamme 600 a également été utilisée dans les stands de Renan De La Godelinais, membre de l’Union des Artistes Modernes, ce qui renforce l’idée de sa possible sélection en 1949.
Les modèles 615 et 215 ont été sélectionnés pour l’exposition « Formes Utiles » de 1953, aux côtés des luminaires de Pierre Guariche et Jean Prouvé. La lampe 210 a été choisie pour participer à l’exposition « Formes Utiles » de 1954 à Milan, pour le pavillon français, avec une scénographie signée René Herbst.
Jumo 215 – Pavillon Français en 1954 – Milan
Jumo 615 – Photo de bureau des établissements Arbey
Au début des années 50, Jumo a apporté une innovation pour une partie de sa collection. C’est le système Varilux, un système d’interrupteur triple sous forme de bague. Cela permet de contrôler le flux lumineux en allumant une, deux ou trois ampoules selon la volonté de l’utilisateur. Ce système évite d’avoir plusieurs interrupteurs sur le même luminaire, comme cela se faisait souvent sur les lampadaires. Les lampes Jumo Varilux font partie des modèles les plus vendus.
Vers 1955, les luminaires des gammes 800 et GS ont fait leur apparition. Bien qu’ils soient associés au monde industriel en raison de leur style, ces luminaires étaient conçus pour les bureaux, comme en témoignent les catalogues commerciaux de l’époque. Ils ont pu se retrouver dans des ateliers mais que très rarement dans des usines.
Au milieu des années 60, JUMO a lancé de nombreux nouveaux modèles, dont les « Spéciales DB 75 » et « DR 75 », qui font partie de mes favoris. La gamme « Roll Bloc » a tenté de rivaliser avec Jielde, mais sans grand succès, Jielde dominait le marché laissant peu de place à la concurrence et précipita beaucoup de marques vers la faillite. Les modèles 1100 et 1200 sont apparus dans la lignée des luminaires du talentueux Louis Kalff pour Philips, et parfois lui sont attribués à tort. La lampe « 71 » était à son apogée, déclinée en plusieurs finitions et trônait sur tous les bureaux de direction.
Le dernier grand succès de JUMO remonte au début des années 70 avec les modèles 750, 900 et 950, que l’on trouve encore fréquemment sur le marché du vintage. Cependant, le déclin de JUMO est survenu avec l’évolution de l’éclairage. Les tubes fluorescents ont envahi les bureaux, offrant une lumière plus blanche, signe de modernité et d’économie d’énergie.
Vers la fin des années 70 (vers 77/78), JUMO a été racheté par la société d’éclairage anglaise Concord, devenant ainsi Jumo-Concord jusqu’en 1991. Cependant, cette alliance a principalement éclipsé JUMO, qui a disparu juridiquement le 23 décembre 1985. Aujourd’hui, Concord se consacre exclusivement à l’éclairage architectural.
Extrait de catalogue Jumo non daté – vers 1955
Quelques informations complémentaires :
La lampe Lucidius Bloc a été également produite au Japon par l’entreprise Nice Creation Co dans les années 80. Elle serait de qualité moyenne, et on la trouverait dans des brocantes ou sur le marché de l’occasion. À ne pas confondre avec l’originale dont le nom est inscrit sous la base. La société New Jumo Concept est née en 2013 avec la réédition de la lampe Lucidius Bloc, nommée Jumo Classique dans les versions blanches et noires. La lampe était fabriquée en France, mais la société n’a plus l’air d’être en activité.
Le modèle 71 est aujourd’hui réédité par la maison allemande Technolumen sous la référence AD34.
Les lampes Jumo ont souvent été produites dans de nombreux coloris. Il n’est donc pas rare de tomber sur des modèles dotés de couleurs originales ! Certaines couleurs peuvent être simplement le résultat d’une restauration non conforme aux couleurs originales.
Astuce : Reconnaitre les lampes Jumo.
Aucune lampe Jumo ne porte le nom JUMO, à l’exception de la Lucidius Bloc ! Elle est également la seule à avoir la mention « Made In France ». Parfois, vous pouvez voir le numéro de la lampe sous le support des autres modèles (déjà vu sous les Jumo 600), mais rien d’autre !Il existe des détails qui ne trompent pas :
- L’interrupteur est toujours situé sur la base ou la lampe, jamais sur le câble.
- Les douilles sont toujours de type B22, sauf la 71 qui à parfois un tube S15.
- Beaucoup de pièces sont communes entre les lampes, et les lampes 100 % originales sont rares ! Comme la 1300M qui vraiment différente des autres gammes.
Les mauvaises attributions : Vous verrez souvent de mauvaises attributions concernant la personne qui a dessiné une lampe Jumo. Jumo avait ses propres dessinateurs en interne, il est de nos jours impossible de connaître les auteurs.
- Certaines lampes (600, 750, 900, 950) sont attribuées à Charlotte Perriand, ce qui est complètement mensonger. Il est fort probable d’imaginer une rencontre entre Charlotte Perriand et les dirigeants de Jumo lors des sélections des modèles pour les expositions Formes Utiles, mais pas plus !
- Il en est de même pour Eileen Gray, à qui la lampe « 71 » est souvent attribuée. Cette lampe est sortie vers 1955, et Eileen Gray avait alors 77 ans ! Après la guerre, elle a simplement réalisé un seul projet d’architecture, mais aucun produit. D’ailleurs, elle a été malheureusement vite oubliée, ce n’est que plusieurs années plus tard que son travail a été redécouvert. Il est donc improbable qu’Eileen Gray ait travaillé pour Jumo.
- Les lampes 500 et 550 ne sont pas de Boris Lacroix, mais il en a réalisé de très proches à la même période.
- Tout comme Étienne Fermigier, il n’a pas dessiné la lampe Triumph ou RS48, mais a produit une lampe similaire pour la marque Monix. »
Inventaire
Pour conclure, voici un inventaire (incomplet) des lampes produites par JUMO. J’espère que cela vous aidera lors de vos différentes recherches pour enfin lever le mystère. Il doit exister un peu plus de 100 modèles produits en 33 ans. N’hésitez surtout à venir m’aider et me faire des propositions d’ajouts de modèles ou de documents.
Les Lampes des années 40
Jumo Lucidius Bloc
- Également nommée Bolide
- Premier modèle de la marque
- Produite dès 1944
350
- Produite Fin 40
320
- Produite Fin 40’/début 50′
- 3280 Francs en 1954
- Équivalent 80€ de 2022
610
- 3430 Francs en 1954
- Équivalent 84€ de 2022
- 2 Réflecteurs différents – celui de la photo vers 1960 – le premier sur les pages du catalogue plus haut
600 – 1er Edition
- 2990 Francs en 1954
- Équivalent 72€ de 2022
- L’une des plus belle réussite de Jumo
600 – version 2
- Produit vers la des années 50
- Existe avec une peinture grise sur la base et la tête, produite dans les années 60
605
- Bras légèrement déporté et plus haut pour la dactylographie
700
- Apercu dans les scénographie de Renan De La Godelinais
615
- 3850 Francs en 1954
- Équivalent 94€ de 2022
- Existe en double hauteur, très rare
Jumo Varilux
- Modèle très répandue d’une grande ingéniosité
Jumo Varilux Elysée
- Différents abat-jours pour les modèles Varilux
Jumo Paris – Sirène
- Certainement le modèle le plus recherché
500 – Tripode
- Modèle assez rare
- 2475 Francs en 1954
- Équivalent 60€ de 2022
550 – Cocotte
- Modèle assez rare
- 2475 Francs en 1954
- Équivalent 60€ de 2022
850
- Modèle assez rare
- Aperçu en vert, jaune et bordeaux
450
- 3080 Francs en 1954
- Équivalent 75€ de 2022
400
- Existe dans diffrents coloris
Inconnue
- Modèle au nom inconnue mais a toutes les caractéristique d’une lampe Jumo.
Les lampes des années 50
210
- Existe avec deux bases différentes (50′ et 60′)
- Existe en vert émaillé style industrielle produite dans les années 60
- 3100 Francs en 1954
- Équivalent 75€ de 2022
215
- Certainement le modèle le plus vendu par Jumo, c’est la lampe Flexible Française par excellence.
650
- Modèle assez rare
820
- 4720 Francs en 1954
- Équivalent 115€ de 2022
- Il existe une version avec un réflecteur plus rond et petit – voir plus haut
- Existe en fixation applique
810 TM
- Version assez répandu
810
- Produite au début des années 50
GS1
- Une des lampes de bureau la plus vendue par Jumo
GS2
GS3
- Existe en lampe à poser sous le même nom
GS4
- Support typique qui était souvent utilisé pour les machines à écrire. Commun à plusieurs fabricant de l’époque. Parfois appelé « lampe d’administration ».
X100
- Applique accordéons ou ciseaux
- modèle commun
Roll Bloc
- Produite dans les années 60
- modèle plutôt rare
- Existe dans 4 formats différents
800S
- Modèle commun
- Existe dans de nombreux coloris
800D
- Modèle emblématique de Jumo, une lampe magnifique et très bien pensé pour les bureaux
71
- Existe dans de nombreux coloris
- L’un des modèles les plus répandus et emblématique
Inconnue 2
- Modèle prévu pour l’exercice de la couture, je n’ai pas réussi à obtenir son numéro
615 Double
- Les Modèles doubles sont les plus rares, possible qu’ils ont été crées dès la fin des années 40.
810 / 2
- Modèle observé une seule fois
Lampes des année 60
Princesse
- 154 Francs en 1966
- Équivalent 232€ de 2023
- Le modèle le plus chère au tarif de 1966
Varilux Chevet
- Modèle différent de sa première version des années 50
- Observé une seule fois
Etoile
- 138 Francs en 1966
- Equivalent de 208€ en 2023
- Modèle en or, je ne l’ai jamais observé
900
- Parfois appelée « Soucoupe »
- 100 Francs en 1979
- Équivalent 53€ de 2022
950
- A l’origine devait être télescopique mais jamais observée.
750
- Existe aussi en version Laiton, certainement produite vers la fin des années 70.
900
- le nom 900 à été attribué deux fois
- Datant certainement de tout début 60
Spéciale DR 75
- DR pour diffuseur rond
- Attribué à tort à Alfred Muller
Spéciale DB 75
- DB pour diffuseur Baignoire
- Modèle très recherché
1100
- Produite dans les années 70
1200
- Dans la ligné du travail de Louis Kalff
1500
- Modèle assez commun
Florence
- Existe en noir ou en vert
- Modèle assez répandu jamais attribué à Jumo
Lampadaire Comodo
- Existe avec un flexible, possible que les deux modèles dates des années 50
- Dans la ligné des modèle 400 et 450
Lampadaire type DB75
- Modèle trés recherché
Les Lampes des années 70
GP 75
- Couleur unique : gris clair
GR 70
- Modèle peu courant
GF 85
- Modèle assez courant
1280
- Modèle que je n’ai jamais observé
1210 M
- Modèle rare, je l’ai observé qu’une fois
1220 J
- Modèle commun mais souvent confondu.
- Existe en jaune ou orange
Cristal
- Observé en noir ou bordeaux
1320 P
- Modèle jamais observé
- Finition gris foncé
1300 M
- Modèle peu connu
- Existe en bronze clair, gris et blanc
- Attribuée à tort à Alluminor
Galaxie
- Jamais observé
VM 70
- Modèle jamais observé
1260 G
- Modèle commun
- Existe avec un flexible sous la référence 1250 B
R P 48
- Modèle commun
R S 48
- Modèle commun
Triumph
- Modèle commun
- Trop souvent attribué à tort à Etienne Fermigier qui a réaliser une lampe assez proche pour Monix
Extraits des catalogues du Comptoir du Sud-Ouest de 1954 et 1955 – Source : http://phozagora.free.fr/
Extrait de catalogue que j’estime entre 1955 et 1960.
Médaille publicitaire de 1963 produite pour le centenaire d’une pièce de 5 Francs du 3eme empire. 287-57-50 est tout simplement le numéro de téléphone.
Notes : Remarque : J’ai tenté de regrouper et recouper différentes sources d’information pour rédiger cet article de blog. N’étant pas historien, si certains d’entre vous possèdent des compléments d’informations ou repèrent des erreurs, je serais ravi que vous me contactiez pour améliorer cet article sur les lampes Jumo.
Sources :
– Livre : Le Mobilier Industrielle de Brigitte Murieux – édition Aubanel
– INPI : différents brevets consultables en ligne
– Phozagora – Catalogue des grossistes
– Catalogue JUMO de 1966 et 1973
– Site : Autre fois la lumière, écrit par Alix Jaltier
– Consultation des Archives de la BNF – ref : 4-WZ-8721
– D’autres informations utiles sur Vintageinfo.be
Bravo !et merci pour ce travail précieux.
J’ai une petite boutique à Romainville où je « brocante » et il y a et il y a eu beaucoup de JUMO….mais je n’avais pas toutes ces informations. Alors encore une fois,merci.
Bien cordialement. L.V.
Merci Lucien pour ton commentaire. Nous conseillons à toutes les personnes curieuses d’aller dans cette boutique qui regorge de surprises ! Et effectivement vous retrouverez beaucoup de modèles de chez JUMO en excellent état.
Je confirme ce que dit Lucien concernant ce boulot de fourmi : précieux !
Merci à vous.
F.T.
Bravo pour ce « très beau travail ».
Cela permettra de ne pas acheter des copies.
Merci pour votre travail de recherche et de mise en ligne. Je viens d’acheter une 600, je l’apprends, version 2!
J’ai adoré votre commentaire sur l’improbable collaboration de Jumo avec Eileen Gray. Il m’arrive très fréquemment de lire des attributions -pour d’autres produits – à des “designers” qui n’étaient parfois, encore pas nés à l’époque où lesdits produits sont sortis. Le manque de recherche et les raccourcis répétés par paresse finissent par déformer la vérité et créer une toute nouvelle histoire.
Merci encore pour votre travail précieux !
Merci pour votre commentaire ! Cela me fait toujours plaisir de voir que mon travail plaît.
Les mauvaises attributions dans le but de faire plus d’argent pour certains revendeurs sont trop courantes mais je dois dire que le travail de recherche prends énormément de temps.
Très bon choix pour la 600, pour moi c’est certainement l’une des plus belles créations du design français, la mienne trône fièrement sur mon bureau.
Bonsoir
Merci pour cet incroyable travail complet.
Amoureux de ces lampes françaises, j’en ai appris encore grâce à votre travail
Bonjour,
Merci pour ce travail qui m’a permis d’identifier une Jumo 650 achetée 10 € en brocante.
Magnifique référencement historique ! Merci pour le partage en ligne. Grĉe à vous, j’ai pu identifier lampadaire Comodo avec tige flexible. Je peux vous envoyer des photos pour illustration.
Cordialement.
Grazie per questo lavoro erudito e appassionato. Vorrei sottoporti una lampada di cui non conosco nulla e che viene attribuita a Jumo. Spero avrai il tempo e la cortesia di rispondermi. Cordialmente.
Grazie per il vostro messaggio. Potete inviare le vostre foto al seguente indirizzo:
contact@lesnouveauxensembliers.fr
Se posso esservi di aiuto, lo farò volentieri.
BRAVO pour toutes ces infos et le partage!!
merci!!!!
Merci pour ces précieuse infos ..j’ai vue qu’il évolue,j’ai donc une.photo d’une jumo qui n’ai pas dans votre liste ,si vous voulez je peux vous envoyer des photos 👍🏻
Style DB75 mais plus vieux .
LA DB75 en plus vieux… je veux bien des photos par curiosité, car cela me dit vraiment rien. N’hésitez pas à m’écrire ici :contact@lesnouveauxensembliers.fr